La chanson de la semaine

vendredi 27 mars 2009

Ahurissants Moondoggies!


Partout la même indication: sous réserve de disponibilité, indisponible pour le moment, etc. Reste deezer et des écoutes occasionnelles - mais intenses, exaltées, électrisantes... Les Moondoggies ont sorti, dès le premier coup, un disque de la trempe d'ON THE BEACH (Neil Young) ou de l'excellent - mais plus isolé, plus solitaire - MAGNOLIA ELECTRIC CO (Songs: Ohia). On se demande où était la presse sur ce coup là. Il n'y a rien qui fasse défaut aux Moondoggies, même après des écoutes répétées, et encore moins l'évidence et l'immédiateté. Alors que le country-rock peut donner dans l'archi rebattu (Changing Horses de Kweller, joli mais vraiment orienté "Gram Parsons touche repeat") ou la perfection lisse et polie (Neal Casal, néanmoins sympathique), sans compter la neurasthénie propre à tout un courant américain très reclus (Will Oldham, etc), les Moondoggies, jeunes, fringants, beaucoup plus rock que ne le laisse penser leur allure (conventionnelle, sans une once de dandysme), vont directement à l'essentiel: des ambiances variées, de l'énergie, de la densité, des contrastes entre l'emportement et l'accalmie, des vrilles d'électricité (l'ahurissant Changing, dont je ne compte plus le nombre d'écoutes) et des enchaînements merveilleux d'arpèges et d'accords. On passe d'un morceau de country sale, bouseux, crotté, à des harmonies dignes de C,S & N, quand ce n'est pas un chant negro spiritual, ou une démangeaison guitaristique chère à Neil Young. Au sein d'un même morceau les Moondoggies peuvent faire jouer toutes les variations de leur musique. Ainsi, débutant par des arpèges en demi-teinte et des harmonies suaves, Night and day évolue, après une brève secousse de piano rythmique, vers des cadences plus enlevées et des passages électriques légèrement stonien (on dirait wild horses ou sister morphine), l'arrivée d'une basse lourde appuyant de sa force compacte le motif des guitares. La chanson finit sur des voix réverbérées et laisse éclater son lyrisme après des pauses et des reprises (essentielles à l'équilibre du morceau, l'effet de leur musique reposant beaucoup sur les contrastes - je crois que c'est la meilleure façon de composer). En disant cela, on n'a encore rien dit, et c'est là le plus terrible. Qui rendrait compte de ce feu d'artifice, de ce pot-pourri de tous les talents (il faut aussi vanter les mélodies vocales, qui plairont notamment aux déçus des Kings Of Leon - dont le chanteur est décidément trop maniéré), qui pour décrire cette mer de corail dont chaque perle étincelle? Il n'y a pas eu mieux en 2008, et pourtant les tops ont mis en valeur des albums de moindre importance. On sait qu'un top de fin d'année est comme une émission des guignols, c'est la foire à la caricature, c'est le bêtisier des goûts populaires. Mais on y trouve parfois des disques qui nous plaisent, voire qu'on adore, comme DIRECTIONS TO SEE A GHOST ou le lourndingue IN THE FUTURE, disques réussis, attachants chacun à leur manière, mais bourrés de tics et de défauts - tous pardonnables -, aucun en tout cas n'égale la perfection de ce premier galon. Et cette pochette...C'est non seulement un grand disque mais encore c'est un objet parfait. Qu'adviendra-t-il des Moondoggies ensuite, eux qui semblent réfuter l'appellation d'americana (nothing deemed americana, lit-on sur leur myspace)? Vont-ils être invités par Neil Young à jouer sur son prochain album? Vont-ils percer et sortir une suite de disques plus consensuels, selon la trajectoire dégénérée des Kings of Leon? Pour commencer, que le disque parvienne aux mains des français. Vite! On en a besoin! Oserait-on espérer, en plus, une tournée qui passe par chez nous? Leur musique prête à rêver, certes, mais il ne faut pas non plus se faire des films.

Moondoggies,
DON'T BE A STRANGER,
2008, Hardly Art

A écouter en priorité: Changing, Long time coming, night and day, Bogachiel rain blues, Black shoe, Jesus on the mainline.

2 commentaires:

  1. waouh, ton enthousiasme est palpable, tu en parles beaucoup mieux que moi! cela dit je n'irai pas jusqu'à placer l'album au niveau de On The Beach...

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  2. La comparaison était facile - il y a des sons similaires je trouve. Ce n'est pas qu'On the Beach soit selon moi le meilleur album de Neil Young, mais celui qui me semble proche des Moondoggies à certains endroits. En dehors de toute comparaison, toujours embarrassante pour un groupe (je suppose que les Moondoggies préfèreraient qu'on honore leur personnalité propre), "Don't be a stranger" est effectivement un disque qui m'enthousiasme au delà de toute mesure.

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