La chanson de la semaine

vendredi 29 octobre 2010

Come Around Sundown

A bien des égards, les Kings of Leon sont les Red Hot Chili Peppers de notre époque. Comparez par exemple Wasted Time, de leur premier album, à The End, et vous aurez à peu près le même écart qu'entre Freaky Stealy et Californication. Rythmée et rêche, leur musique est devenue le coucher de soleil "Palm Beach" qu'arbore cette magnifique pochette. C'est la loi des majors, direz-vous. Il se peut. Mais là n'est pas le plus intéressant. Plutôt que le regret, je préfère la curiosité. Comme à l'instant même j'écoute Youth and Young Manhood, après avoir visionné le clip plein de bons sentiments mais involontairement colonialiste de Radioactive, je ne peux qu'être effaré par la distance qui sépare, en 7 années seulement, les débuts du groupe de Mount Juliet, Tennessee, terre du whisky et de la country, et leur nouveau style passe-partout dans la tradition du rock de stade. En 2003, le groupe jouait un folk-rock racorni mais jubilatoire, cradingue et criard comme un groupe punk qui se serait paumé dans un no man's land et y aurait rôti au soleil, rangeant les guitares dans des vans déglingués. En 2010, les Kings of Leon n'ont plus grand chose à voir avec le folk-rock et encore moins avec le rock'n'roll de saloon, viril et un rien macho. Au contraire, la voix de Caleb Followil, tout en demeurant nasillarde et ébréchée, s'est considérablement féminisée, pour n'être plus, parfois, qu'une plainte - qu'on imagine simulée. L'authenticité et la culture roots peuvent se perdre, mais à quelle vitesse! Si on y réfléchit, il était arrivé la même chose, dans un autre genre, aux Red Hot Chili Peppers. D'abord dingos et frénétiques, les shootés du groupe s'étaient mis à faire de la pop mélodieuse, progressivement tentés par le chatouillement des fibres sensibles (Scar Tissue... quand même un sacré morceau) et peut-être aussi par l'argent et la renommée. Ce faisant, ils n'avaient pas laissé tomber la basse, l'élément le plus important du groupe, ils s'étaient contentés de ralentir considérablement les rythmes. Les Kings of Leon font la même chose: slow down, ils décélèrent, mais ne lâche pas la basse. Mais la comparaison ne s'arrête pas là.Les frères Followil ne partagent pas seulement avec les RHCP une évolution vers le mainstream, auquel cas j'aurais pu choisir aussi bien R.e.m. Il se trouve que la pochette de Come Around Sundown, avec ses palmiers irradiés, est le pendant sudiste de Californication. Or, le succès public risquant bien d'être à la hauteur des attentes de Sony, on pourra sans doute dire, d'ici quelques années, que Come Around Sundown est aux années 2010 ce que le disque des californiens étaient aux années 90. A savoir un blockbuster populaire très plaisant, une petite cure de lumière dans le monde clinquant du mainstream. Même si la densité des émotions reste assez maigre, une chanson comme Down Back South s'écoute avec un agréable pincement au cœur. Peut-être parce que cette chanson nostalgique laisse entrevoir un retour au source, ou au contraire parce qu'elle exprime un dernier adieu, elle plaira aux fans d'americana et des anciens Kings of Leon. Personnellement, je justifie l'achat du disque par cette chanson. Mais c'est dépenser beaucoup pour peu.
Car il ne faut pas se leurrer, le reste de l'album s'éloigne considérablement du style sudiste et lorgne vers la grandiloquence de U2. Les guitares ont un coté "the Edge" qui pourra agacer certaines sensibilités. Ecouté à grand volume, ce disque révèle bien de solides qualités musicales et ne démérite pas du tout (l'inédit Celebrations, dans la version deluxe, par exemple, est comparable à n'importe quel morceau psyché plébiscité à longueur d'année par les bloggueurs et les amateurs éclairés) mais il ne se prête pas à une écoute attentive, ne laisse pas non plus admiratif.
De mon point de vue, Come Around Sundown est musicalement un bon disque, plombé malheureusement par une voix de plus en plus encombrante. L'organe vocal de Caleb Followil était autrefois une force et c'est en quoi le passage grand public des Kings of Leon s'avère un semi-échec. Jamais Followil n'aura été un grand mélodiste; peu adepte des phrasés musicaux bien écrits, il a toujours privilégié l'expression brute, qui passe par des variations de timbre et de volume. Il n'y a jamais eu, avec lui, d'air à fredonner. C'est ce qui le rapprochait auparavant du blues, plus que de la country. Mais cette particularité est devenue un défaut. Il ne fait plus que crier uniformément, avec un petit accent plaintif qui gâche parfois mon plaisir. En revanche, le remix de Closer, toujours sur la version deluxe, est trippant. Preuve qu'à n'importe quel moment, il peut revenir à de meilleures intentions.
Bref, si on fait le cumul de toutes ces remarques, vous remarquerez que ma chronique n'est ni acerbe ni laudative. Elle reste dans les limites de la curiosité et de l'intérêt. Rien n'est tout à fait à jeter chez les Kings of Leon, mais rien n'est désormais totalement bon. Sauf la pochette, bien sûr.
En tout cas, les amateurs d'americana ont trouvé de quoi alimenter le foyer de leurs discussions, car au prix d'un travestissement douteux les Kings Of Leon ont porté le folk-rock au devant du public, qui finira bien par en venir aux premiers disques. Tout ce que j'espère, c'est qu'ils gardent toujours un petit quelque chose de leurs origines sudistes, car mon oreille prête attention, même dans les moins bons morceaux, aux fragments d'ambiance, aux notes perdues qui réveillent l'image des grands espaces.

jeudi 28 octobre 2010

Twenty Miles

Dans le petit monde de l'americana, dont le défunt magazine Eldorado se faisait jusqu'alors le porte-parole en France, Deer Tick commençait à jouir d'une certaine réputation, acquise sur la foi d'un album, Born on Flag Day. Mais ce début d'estime ne passait pas les frontières. Ici, le nom n'évoque toujours rien et la pochette de l'album semblait d'ailleurs le destiner à un public exclusivement yankee. Du fait de cet anonymat déconcertant, je n'avais jamais songé à écouter une chanson du groupe. C'est dommage, mais le hasard a réparé cette omission. Twenty Miles, extraite des Black Dirt Sessions, est la chanson folk-rock qui fait oublier que les autres pousses de l'americana, les Felice Brothers par exemple, sont trop souvent décevants (c'est-à-dire en dessous de leur potentiel). C'est en piochant une chanson aux uns et aux autres qu'on se fait une bonne idée de l'americana roots et rêche d'aujourd'hui. Rien à voir, si vous me suivez, avec les paisibles et très radio-friendly Band Of Horses (que j'aime d'ailleurs beaucoup). Mais rien à voir non plus, heureusement, avec les ballades efféminées des songwriters bourgeois-bohèmes. Deer Tick est un authentique groupe de folk-rock plongeant le nez dans le whisky. L'alcool pur n'est pas mon truc, mais la musique qui en découle, si.

mercredi 27 octobre 2010

Monts et merveilles


Il y a deux choses qui me laissent pantois avec Miami: le début et la fin. Carry Home, Mother Of Earth. Pour passer de l'une à l'autre, il faut attendre un peu plus de 30 minutes, mais le temps passe vite. Jeffrey Lee Pierce et les siens ont réalisé le disque rock presque parfait: deux moments forts, inégalables, insurmontables, du genre qui ferait chanter, comme David Tattersall des Wave Pictures: "I'll die for beauty", et puis, pour le reste, des chansons de bonne tenue, plutôt rock'n'roll années 80, dans la lignée crue et minimaliste des Cramps. Or, les meilleurs morceaux sont, quoi qu'on fasse, les plus tristes. C'est peut-être le fait d'une pathologie personnelle et extrêmement virale, mais il me semble que les chansons exsudant une certaine douleur - à condition qu'elle soit transcendée - sont simplement plus vitales que les autres. Non que la gaieté soit plus frivole que la tristesse; celle-ci n'est pas même à un plus haut degré que la joie le lot commun des hommes puisque la plupart d'entre eux, dans nos sociétés occidentales, passent plus de temps à rire qu'à pleurer, mais d'une part la tristesse en musique n'est pas la même que dans la vie: elle n'enfonce pas, elle élève; d'autre part, elle creuse un espace vacant en nous-mêmes, elle nous rappelle que rien ne dure, que le temps s'écoule, elle nous éveille au sentiment de notre solitude imprenable. L'impression qui découle d'un morceau comme Mother Of Earth est celle d'une escapade héroïque, sans retour possible, d'une fuite loin de la médiocrité, des contraintes, des compromis, de la demi-mesure - autrement dit, une impression de liberté totale, de souveraineté sur soi et sur le monde. Bref, on est en plein fantasme. Mais c'est le privilège de la musique: produire des instants réversibles dans une existence enchaînée aux causes et aux effets. C'est pour ça qu'on l'aime: pendant trois minutes, on brûle d'un certain feu, puis, avant qu'il nous réduise en cendres, on passe à autre chose. Il n'y a pas de cendres avec elle. Il n'y en a pas non plus avec le Gun Club.

lundi 25 octobre 2010

Soufflé!


Je m'empresse d'apporter une rectification au message précédent: le nouvel album des
Moondoggies, contrairement à ce que j'ai écrit, est parfaitement audible sur internet. Il est même disponible à l'écoute dans son intégralité sur la page facebook du groupe. Pour quelqu'un qui prétendait "apporter un soin particulier" à leur actualité, me voilà bien penaud. Quand on cherche bien, on trouve toujours, donc voilà, pour vous éviter la peine de farfouiller en vain et surtout pour m'assurer que vous ne puissiez plus passer à coté, je vous poste le lien ici-même. Je me vois aussi dans l'obligation - délicieuse - de retoucher à mon premier jugement: si Empress of the North est une chanson folk un peu monotone, elle est très loin d'être à l'image de l'album. Les Moondoggies n'ont pas, comme je le craignais, remisé leurs guitares électriques, bien au contraire. J'en suis actuellement à l'écoute du troisième titre de l'album et je me prends une claque, comme on dit couramment. Il n'y en a pas un des trois qui soit inférieur aux meilleurs morceaux de Don't Be a Stranger. Je ne sais pas comment exprimer mon enthousiasme. It's a shame, it's a pity, Tidelands et What took so long sont des pépites de folk-rock sans temps morts. Ni Fleet Foxes, ni Midlake ne sont capables de ça.



TIDELANDS
The Moondoggies, 2010
Hardly Art

Les Moondoggies sont toujours là


Curieuse destinée que celle de ce blog, dans lequel j'affichais précocement mon mépris pour le brit-rock, sur des pages jaunes sépia évoquant autant les vieux livres que les saloons poussiéreux, et qui - ironie du sort - a été rebaptisé du nom d'une chanson incarnant mieux qu'aucune autre le ska-rock et le merseybeat anglais. Il ne faut jamais jurer de rien. Mais ce revirement ne signifie pas que dans un mouvement général de déni, je jette aux oubliettes tout ce qui, pendant quelques mois, aura fait la substance de Between the Lines of Age, à savoir le folk-rock américain, le soleil, la guitare électrique chaude et spasmodique du loner, les routes du désert et les grands espaces recevant les derniers rayons du soir. Non, bien sûr. Les Moondoggies, par exemple - et quel exemple! - auront toujours droit à une actualité soignée et accueillante. Vous souvenez-vous? Mes quelques rares lecteurs auront remarqué, sans nul doute, le déploiement de force rhétorique que j'avais mis au service de la promotion de leur premier album, sorti en 2008. Je l'avais comparé à On The Beach, de Neil Young. ça ne rigolait pas.
Pas plus aujourd'hui. Des mots écrits en cette année 2009, je n'en retire aucun. Don't Be A Stranger reste un des meilleurs albums de folk-rock que j'ai entendus. The Dutchess and the Duke sont encore meilleurs, car plus roots et moins sophistiqués, mais à la réflexion et quoiqu'ils viennent les uns comme les autres de Seattle, on ne peut pas les comparer. En octobre devrait sortir (ou devait) le nouvel album des Moondoggies, Tidelands. Inutile de dire que la France attendra longtemps avant d'en voir la couleur. Même Youtube, quelques jours après sa sortie supposée, reste désespérément silencieux. Tout ce que l'on peut savoir de ce nouvel album, un single nous l'apprend: Empress of the North. L'impression est mitigée: d'un coté le groupe montre qu'il n'a pas perdu son âme et ce nouveau titre s'apprécie comme une chanson secondaire, de la même façon qu'Undertaker était une très bonne chanson folk de Don't Be A Stranger sans pour autant en constituer un des morceaux indispensables. Pour un single, j'aurais aimé plus, quelque chose de la trempe de Changing ou de Long Time Coming. Pendant 4 minutes, j'ai attendu la guitare électrique, le coup de batterie qui allait sonner la charge, mais rien. Empress of the North est juste une ballade folk, et ce n'est déjà pas si mal.

dimanche 24 octobre 2010

Smith Westerns/Girls



Une petite vidéo circule sur le net, signée Ryan McGinley et présentée par le site Nowness. J'ignore tout à fait la raison d'être de ce petit film, qui a tout l'air d'un extrait de documentaire mais qui, en fait, se suffit à lui-même. Qu'est-ce que Nowness? Qui est Ryan McGinley? Pourquoi cet intérêt tout esthétique porté à deux groupes indés dont la notoriété croissante n'a pas dépassé le circuit indépendant? A en juger par la stylisation à outrance - mais exquise - Ryan McGinley cherche la fascination, il exploite le coté underground élégant et très efféminé des deux groupes, comme pour subjuguer monsieur-tout-le-monde, le décontenancer par un foisonnement éclatant de détails inédits (les vêtements de Christopher Owen, période art nouveau, la chaussure qui frotte l'arrière du genou - geste commun aux deux groupes) . Il se dégage de cette vidéo une homogénéité propre à faire croire en l'existence d'une sensibilité nouvelle, raffinée et clandestine, pour ne pas dire d'un mouvement. Mais le plus important n'est peut-être pas ce maniérisme très étudié: les Smith Westerns dévoilent, via cette vidéo, une nouvelle chanson, absolument subjuguante. Alors que leur premier disque crachotait un son d'avant-guerre, broyait sans scrupules les mélodies dans un hachoir, le groupe a entamé une mue impressionnante - on ne peut pas appeler cette métamorphose autrement, car les Smith Westerns semblent avoir gagné plusieurs années de maturité en l'espace de quelques mois. D'un garage-rock brutal et sémillant, ils passent à une sorte de glam atmosphérique, qui doit autant à Marc Bolan, leur icône, qu'à My Bloody Valentine. Peut-être que je ne m'y connais pas assez, mais je trouve le résultat inouï. En ce sens, l'objectif de la vidéo de McGinley est amplement atteint: à mon corps défendant, je me sens sidéré et admiratif devant cet ovni, cette brillance et cet éclat venus d'un autre monde. Il en ressort l'impression d'assister à la naissance d'un grand groupe. Cela se sentait déjà l'an passé, c'est désormais une certitude.

samedi 23 octobre 2010

faces-b

Des débuts qui promettaient:



Des promesses tenues - et ce ne sont "que" des faces-b:



vendredi 22 octobre 2010

Le Retour

Ils sont plusieurs à revenir en novembre. Et non des moindres. J'aurais aimé parlé de Kurt Vile, en solo bien sûr, mais rien ne me vient à l'esprit. Ses nouvelles chansons folk sont comme des face-b refourguées. C'est un vide sidéral, un ennui inacceptable. Il a gardé le meilleur pour the War On Drugs. Future Weather, du groupe de Philadelphie, s'annonce en effet du même tonneau que l'album de 2008. Comin' trough est radieux, svelte, élancé. Chose appréciable, Kurt Vile pose ses mots avec moins de paresse et de nonchalance que sur son dernier ep.
Puis, il y a les Crystal Stilts - j'allais écrire les Crystal Castles, car il y a presque autant de groupes dont le nom commence par Crystal que de groupes dont le nom commence par Black - ils ont eux aussi sorti un disque magnifique en 2008, trop peu médiatisé et parfois considéré à tort comme une fumisterie de snobinards prenant la pose cynique et inquiétante du Velvet Underground. En fait, c'est surtout un excellent groupe de garage-rock, dans la famille des Mantles et des Fresh and Onlys, mais en plus sombre. Les Fresh and Onlys, dont on parle aussi cette semaine, sortent également un nouveau disque. Avec ça, on a de quoi faire le mois.





samedi 16 octobre 2010

1000 Years... c'est longuet.


Voici un petit billet d'humeur écrit à la parution du single des Coral 1000 Years, précédant de peu la sortie du disque. Mon avis n'a pas changé, c'est pourquoi je le pose ici.

Vivement le prochain album d'El Goodo.

Voir les meilleurs décliner est amer, car on sait que le monde est ingrat et profite de chaque occasion pour ne retenir que le pire. Depuis leur premier album les Coral se reconvertissent doucement mais surement vers un folk-rock américanisé soyeux, léger, gracile mais aussi un peu trop tiède. N'eût été l'audace magistrale de leur prime discographie, et notamment ce premier album de dingue, en 2002, qui me renverse tous les jours ou presque, l'adepte de musique ensoleillée que je suis aurait pu leur pardonner cet inexorable vieillissement, surtout sous une forme aussi acceptable. Mais non, ce sont les Coral! Les gens qui ont créé le must de l'anglophilie avec Dreamin' of you, Calendars and clocks, Simon diamond, j'en passe et des meilleures (et pour une fois ce n'est pas qu'une figure de style). Venant de ceux qui ont su, pendant un laps de temps, ne pas confondre sophistication et richesse, qui, au meilleur d'eux-mêmes, ont réussi l'improbable en faisant converger sophistication, richesse et puissance, on ne peut rien laisser passer. 1000 Years serait honorable si David Crosby l'avait écrit, on laisserait certains groupes, comme les Byrds, composer ce genre de gentil nanar, agréable et chaleureux, doucettement atmosphérique et pépère. Mais pas les Coral. Ils ont été au-dessus de ce genre de musique pendant des années. Ce qui est tolérable ailleurs est indigne d'eux. Il y en a, pourtant, qui ont l'air d'aimer. La quarantaine acquise - au moins - les gens de Magic! s'accroupissent si bas qu'ils intègrent le nouvel album des Coral à la liste des meilleures réussites du groupe, qui, bizarrement, ne comprend même pas le premier album, leur vrai chef-d'œuvre. Avec un peu de chances, se dit-on, 1000 years et Butterfly House ne seront que des exceptions malheureuses dans leur nouvel essai... J'ai peine à la croire, il semblerait plutôt que ce nouveau disque s'adresse aux lecteurs de Magic!, aux vieux, aux fans de C,S & N (eux seront contents au moins) et à ceux que n'ennuient pas trop les dernières réalisations de Shack. Pour les autres, la coupe est amère. La nature reprend ses droits sur tout et tous. On en oubliera peut-être qu'ils furent sublimes. On entend bien certaines personnes prétendre que Federer n'était pas si fort, alors... (02/07/2010)

dimanche 10 octobre 2010

Yankee Hotel Foxtrot en Belgique


Ceux qui déplorent l'existence de produits variés comme Deezer, Spotify, voire Myspace, au nom des bonnes vieilles radios doivent avoir des goûts très larges et beaucoup de temps à perdre. Pourquoi abandonner les précieuses minutes de nos vies à des programmateurs qui choisissent pour nous l'ambiance musicale de nos journées ? Comment accorder notre confiance à des gens payés pour diffuser tout et n'importe quoi ? La curiosité, le goût de la découverte, même, n'y suffisent plus. Il suffit d'avoir allumé le poste radio pendant une journée pour savoir que la même rengaine se répète ad eternam, entrecoupée de spots publicitaires et de bavardages. Restent les stations spécialisées: jazz, classique... Mais nos goûts personnels ne sont pas forcément solubles dans la culture.
La musique est trop importante pour la laisser entre les mains des programmateurs. Toutefois, il y a des moments où, dans l'absence d'une solution alternative, il n'est pas d'autres choix que d'allumer la radio. Ainsi, dans une voiture équipée d'un rudimentaire autoradio, vous êtes bien obligés de vous rabattre, non sans déception, sur cette option de seconde zone.
Dans le Nord de la France, sur Pure Fm ou Classic 21, les probabilités sont grandes pour que vous tombiez sur le dernier Arcade Fire ou, proximité de la frontière oblige, sur un groupe belge, comme Eté 67. C'est donc par un pur hasard que j'ai découvert ce groupe et la sympathique chanson "Passez la frontière" qui m'a rappelé une chanson de Wilco. Voyez ça: allumer l'autoradio, près d'Arleux, dans un des coins les plus paumés de la France, et entendre le fantôme de Yankee Hotel Foxtrot! Quelle surprise! J'avais rangé l'album depuis belle lurette, mais Eté 67 m'a rappelé à son bon souvenir. Les paroles - auxquelles je n'ai guère prêté attention - sont chantées en français d'une voix un peu molle, sans grand caractère - défaut persistant du folk francophone -, mais l'accompagnement, très soigné, diffusait une impression de luminosité douce et agréable, avec des petites touches de guitare électrique au son propre. Un rayon de soleil se pose sur la carrosserie, le temps est clément... La matinée se lève. La ciel, pâle comme un pastel, promet une belle journée. Et moi, je file réécouter Wilco, histoire de vérifier.

vendredi 1 octobre 2010

Harlem


En mars sortait un des albums que j'attendais le plus cette année. Qui plus est, il sortait sur le label Matador, auquel, contrairement aux évidences, je ne dois pas mon pseudonyme. Le hasard a en effet voulu que ma personne y soit associée dans l'esprit de mes quelques lecteurs. Or, c'est une bonne chose car ce label recèle de véritables trésors. Je ne vous ramène pas à l'ère de Pavement (que je n'aime pas beaucoup), ni même à Yo La Tengo, mais, pour ne prendre que les plus récents, songez à Jay Reatard, aux Ponys ou à Kurt Vile, dont je n'ai pas chroniqué le dernier (et hélas mauvais) ep. Belle brochette de talents, à laquelle vient de s'ajouter un nouveau nom.
Nul doute que Harlem ne se prépare à un avenir doré, aux cotés des Black Lips, des Soft Pack et des Strange Boys. La quadrature est ainsi parfaite. Au centre du carré, on placera les Mantles, ces modestes génies du garage-rock mélodieux. Avec cela, il est possible d'être heureux.
Harlem, pourtant, a commencé par me décevoir, tout comme ces Stranges Boys braillards et dégingandés, qui geignaient leur country dans la fumée d'un mauvais saloon. Mais, tout comme on n'enlève pas Be Brave à ceux qui l'ont créées, on ne retire pas non plus à Harlem le privilège d'avoir écrit Gay Human Bones ou Faces. L'album, pour un disque garage, est un peu long, ou disons qu'il y a trop de chansons, mais pourquoi s'en plaindre? A l'heure où l'i-pod a remplacé le cd, qui se soucie encore d'une juste répartition des morceaux, de leur quantité, de leur ressemblance? Aussi bien, il est possible, selon le jour ou l'humeur, de piocher par-ci par-là l'une ou l'autre de ces vignettes brillantes. Tout y est bon. Ce n'est bien sûr pas très innovant, d'autant que la promotion du disque, au moment de sa sortie, se donnait un petit air de "rébellion officielle", affichée en attrape-nigaud dans les pages publicitaires des journaux. La jeunesse désinvolte et désobéissante, dans la lignée de Pete Doherty, n'étant qu'une image de plus dans un monde d'images et de modèles, où l'objectif ultime est d'avoir la classe, il ne reste plus qu'à fermer les yeux sur ces vaines fanfaronnades. La naïveté idéologique, parfois, irrite. Mais Harlem n'en est pas responsable. Le groupe se contente de jouer avec un plaisir communicatif des chansonnettes simples et bien troussées. Je me contente, de mon coté, d'y prendre le mien sans trop chercher à en savoir plus sur ces larrons-là.

Don't be scared


Vous voulez un rock qui tâche? Un rock blouson noir, viril et bruyant? Laissez là le dernier disque des Black Angels, ces antiquaires - boutiquiers d'un psychédélisme à l'ancienne, dans le style "moustique qui bourdonne" - et jetez l'oreille sur ce groupe déjà vieux de 10 ans mais largement méconnu. Si on s'en tient aux voix, A.R.E Weapons est un groupe trash. En une écoute de leur myspace, l'auditeur a reconnu la trame répétitive du rock traditionnel (On the subway) sabordée par des branleurs désinvoltes. Pas besoin de chercher plus d'images sur le net. L'allure de ces gaillards ne saurait faire de doutes. A.R.E Weapons est l'incarnation du rock sale, débraillé, borderline et j'm'en-foutiste. Mais c'est aussi un groupe à tendance électro sacrément débrouillard et braillard. Les Big Pink ont eu du succès l'an passé avec un album médiocre dans le même style, mais sans les fulgurances de Don't Be Scared. A.R.E Weapons sont cent fois meilleurs. Ils sortent un nouvel album courant octobre (Darker Blue). On en reparlera.