La chanson de la semaine
lundi 7 décembre 2009
GIRLS
Je m'aperçois qu'un mois s'est presque écoulé depuis le dernier post. Ce n'est pas que la matière manque. Prenons l'album des Girls. Je veux en parler depuis des semaines. Je pourrais tartiner cent lignes là-dessus. Mais toutes futiles, à coté du sujet ou redondantes. Quand on aime trop un disque, on se contente d'une exclamation. Ce post est donc une exclamation un peu longue, n'ayant pas trop en vue de parler musique.
En effet, l'écoute risque d'être tellement biaisée par les médias qu'il est peut-être judicieux de ne plus en rajouter. Ayant eu la chance de l'écouter sans passer par trop d'intermédiaires, j'ai pu me concentrer sur l'expérience musicale, sans l'associer à cette image de jeunes cancres obsédés par le sexe ni à aux louanges des distributeurs d'opinion. Depuis, l'engouement médiatique (quasi unanime: Pitchfork, Magic, R'n'F, the Guardians...) a entraîné son lot de positionnements contradictoires. Tout ce qui est unanimement médiatisé - encore plus dans un milieu indé qu'on suspecte fortement d'avoir ses petits codes trompeurs, ses propres miroirs aux alouettes - déchaîne les suspicions.
Or, il faut remettre les choses à plat: pour arriver à cet engouement, un groupe ne peut pas se contenter d'une notice d'attaché de presse ou d'un coup de pouce. La plupart des groupes qui sont parvenus à attirer l'attention le doivent à une certaine qualité, même si cette qualité peut n'être que la convenance à la mode. Kings Of Leon, Strokes, Killers, Franz Ferdinand... Je n'aime pas vraiment la moitié d'entre eux, mais ce n'est pas nul non plus. Girls est là, pas loin du sommet de la pyramide indé, et il y est parce qu'il le mérite. Il n'y a pas longtemps, j'écrivais de Joe Henry: "il a l'air crédible parce qu'il l'est". Pareil pour Girls. C'est le groupe qui est susceptible de donner envie de faire de la musique à un jeune de 18 ans. On a pris une guitare parce qu'on a écouté - quoi? Nirvana, les Smashing Pumpkins (références pour Girls)? Oasis? Eh bien, Girls se pose là. Et tout de suite. Avec un album pas parfait du tout, mais super. La perfection est une chose, genre œuvre de salon, l'apanage de Joe Henry par exemple; le disque super en est une autre. C'est ce genre d'album qu'on adopte dès la première écoute, sans même se poser la question à un moment ou à un autre de savoir si c'est vraiment bon, si ce n'est pas, somme toute, la décalque de quelque chose de plus ancien. C'est à l'usure, parce qu'on a éprouvé des sensations indélébiles mais aussi parce que l'accoutumance l'a rendu indispensable, que l'album acquiert sa valeur affective ET esthétique (l'album devient un objet esthétique après coup). Il serait donc trop tôt, si on me suit, pour vanter Girls. J'aurais pu attendre encore un an ou deux avant de laisser une chronique. Mais finir l'année sans avoir mentionné l'existence de ce disque ç'aurait été chicaner sur des détails sans évoquer les grandes lignes!
Pourquoi? Parce que c'est une cohabitation réussie entre l'amateurisme du chant et le professionnalisme d'une mise en son lo-fi par faute de moyens, mais talentueuse par son savoir-faire. Parce que c'est le printemps éternel, une vision musicale du bonheur (moyennant des paroles tristes), un rêve californien et adolescent, avec mélodies, harmonies vocales et rythmes entraînants (Lust for Life, Laura, God Damned). Parce que c'est un rappel des sensations originelles du rock indé, celles qu'on a éprouvées une première fois en écoutant les groupes marquants des nineties (notamment la noise de Morning Light ou le mur du son qui conclut Hellhole Ratrace). Surtout, parce que ce disque est ambigu, comme les meilleurs, louvoyant sans cesse entre le jour et la nuit, la joyeuse pop estivale nuancée par des paroles crues (Laura), le rock vite envoyé (Big Bad Mean Motherfucker) et la tristesse d'une complainte (Lauren Marie). C'est vraiment très bon et, tout jeunisme à part, on se demande si on n'aurait pas dû avoir 18 ans à sa sortie. En tout cas, une fois qu'on l'a, on n'a plus besoin de disques avant longtemps. Et ça, c'est très rare.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Tout à fait, cet album déchire sa race.
RépondreSupprimerDonc il sera dans la sélection des 37 bloggeurs?
RépondreSupprimerLe problème, tout le monde ne partageait pas cet avis mais sur les 37 blogueurs, il y avait de fervents défenseur donc tu verra bien mercredi!
RépondreSupprimerJe croyais qu'il en faisait partie bah en fait non!! Bon l'année prochaine tu rejoins les rangs pour éviter toutes injustices?
RépondreSupprimerJ'ai réfléchi à l'éventualité, mais je crois que je n'aurais pas eu 20 disques à proposer!
RépondreSupprimer